"« La récré » est un espace de liberté"

Mis à jour le 21.06.25

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CHRISTINE BRISSET est chercheuse associée au laboratoire cultures éducation société (LACES) à l'université de Bordeaux et enseignante-chercheure en psychologie et en sciences de l'éducation et de la formation à l'Insei de Suresnes.

Christine Brisset

QUE NOUS RÉVÈLE L’OCCUPATION DES ESPACES EN RÉCRÉATION ?

Dès l’école maternelle, l’occupation de la cour est très genrée. De nombreuses recherches le corroborent. Bien souvent, les garçons vont choisir davantage les jeux de ballon, occupant une grande partie de l’espace, alors que les filles vont choisir plutôt d’autres jeux, comme la corde à sauter, auxquels elles joueront dans un coin. Par ailleurs, des élèves restent près des adultes ou sur un banc. Certains d’entre eux, notamment les plus jeunes, se sentent en insécurité, ayant, par exemple, peur d’être bousculés.

QUELLES INCIDENCES SUR LES ÉLÈVES ?

Partager l’espace et les jeux n’est pas simple. Prendre conscience pour les enfants de ce qui se joue en récréation non plus. Des querelles ont souvent lieu. Si des disputes surviennent principalement avec le partage du matériel, comme les trottinettes, beaucoup de « bagarres » sont « pour de faux » rapportent les élèves. Porter un autre regard sur le comportement des enfants incite à adopter des stratégies pour différencier les imitations d’agressivité des conflits avérés, qui ne sont pas si nombreux que cela. Amener les élèves à verbaliser, à analyser ce qu’ils ont vécu, permet de faire la part des choses et prendre conscience de ce que peut engendrer une « vraie bagarre ».

COMMENT LES ADULTES DE L’ÉCOLE PEUVENT-ILS SE POSITIONNER ?

Pour les écoles de grande taille, décaler les récréations peut renforcer le sentiment de sécurité, en particulier pour les plus jeunes. Réfléchir avec les enfants aux jeux proposés peut aider à ce que chaque élève ait sa place. Les responsabiliser dès le plus jeune âge est essentiel car « la récré » est un espace de liberté qu’ils doivent s’approprier dans un cadre serein. Le jeu des trois figures formalisé par Serge Tisseron où une situation vécue est reproduite - avec les rôles d’agresseur, d’agressé et d’observateur - permet de réaliser qu’un observateur a un rôle important à jouer, comme intervenir ou alerter.

Des ateliers de langage ou des débats philo type Michel Tozzi permettent de prendre en compte la parole des enfants. Ils apprennent à être partie prenante, à communiquer de manière non violente ou à décider d’aménagements de la cour. En responsabilisant les enfants, le climat est apaisé et renforce la confiance des parents pour qui la récréation est parfois synonyme de danger.