“La laïcité, ciment de la République”

Mis à jour le 26.11.21

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Jean-Louis Bianco a été nommé président de l’Observatoire de la laïcité en 2013. Après la dissolution de cet organisme, il a créé en juin dernier l’association Vigie de la laïcité qui entend éclairer de façon dépassionnée les débats souvent exacerbés sur la laïcité, en s’appuyant sur la loi et le droit.

Jean-­Louis Bianco Homme politique, est depuis toujours militant de la laïcité. Il a été secrétaire général de l’Élysée, puis a occupé plusieurs fonctions ministérielles et mandats électifs. Auteur de plusieurs ouvrages politiques il a notamment publié en 2016 « La France est-elle laïque ? » aux éditons de l’Atelier.

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Jean-Louis Bianco a été nommé président de l’Observatoire de la laïcité en 2013. Après la dissolution de cet organisme, il a créé en juin dernier l’association Vigie de la laïcité qui entend éclairer de façon dépassionnée les débats souvent exacerbés sur la laïcité, en s’appuyant sur la loi et le droit.

En juin dernier, vous avez créé la vigie de la laïcité; De quoi s'agit-il ? 

Il s’agit d’une association créée suite à la dissolution de l’Observatoire de la laïcité reconnu comme un outil utile donnant des éléments pour que chacun puisse prendre des positions. Cette dissolution a engendré beaucoup d’inquiétudes de la part des acteurs de terrain les plus divers, des fonctionnaires, y compris de l’éducation nationale, des agents publics locaux, des élus, des militants syndicalistes, des militants de la laïcité. Sur le site, au travers de quatre rubriques - décryptage de l’actualité, bonnes pratiques, l’état de la science, ce qui se passe à l’étranger - la Vigie défend une certaine vision de la laïcité qui n’est pas une doctrine à apprendre par cœur.
Elle s’est dotée d’un conseil scientifique de 40 chercheurs issus de tous les domaines de la recherche - sociologie, anthropologie, histoire, etc. – qui apportent des contributions mais qui sont aussi un réservoir potentiel de personnes ressources. Un conseil scientifique international d’une vingtaine de chercheurs va également être mis en place car la laïcité n’est pas qu’une question française.

Quel rôle peut-elle jouer dans la défense de la laïcité ? 

Un rôle de recensement de ce qui se fait. Savoir ce que disent les gens de terrain, quelles solutions ils apportent, quelles difficultés ils rencontrent, que dit la recherche. Partout en France, en outre-mer et parfois à l’étranger, dans l’Éducation nationale, dans les associations, dans les municipalités, les universités, beaucoup de gens font des choses très bien mais cela n’est pas connu au-delà du réseau auxquels ils appartiennent. Il s’agit de mettre en lumière ces actions, ces bonnes pratiques, cette manière d’attaquer un problème qui n’est pas forcément résolu mais qui est bien posé, pour trouver des solutions. Il s’agit aussi de savoir ce que dit la recherche pour avoir une base de réflexion un peu plus rigoureuse et moins polémique. Le rôle de la Vigie est de devenir une référence pour la prise de décisions. Il s’agit d’une bataille politique au sens où il faut souvent déconstruire ce qui est dit. L’espoir est d’avoir, petit à petit, un débat moins caricatural, moins purement émotionnel. Il y a une énorme attente qu’on ne veut pas décevoir.

La dissolution de l'observatoire a fait suite à une polémique assez virulente. Quelle est votre analyse rétrospectivement ? 

L’Observatoire de la laïcité dérangeait, cela se voyait. Nous avons compris assez vite, et pas seulement Nicolas Cadène (ancien rapporteur général de l’observatoire - NDLR) et moi-même, que nos points de vue, nos propositions suscitaient des réactions. L’Observatoire avait pris l’habitude de prendre des décisions par consensus et à l’unanimité, ce qui prenait du temps. Dans cette instance qui était basée sur une confiance informelle, nous avons pu beaucoup avancer. Malheureusement, l’Observatoire n’a pas résisté au courant du monopole de la bonne parole sur la laïcité à l’œuvre dans le monde intellectuel, politique et médiatique. Dans certains secteurs de l’opinion, des personnes ont exprimé des prises de position très agressives, qui en général ne faisaient pas allusion à un texte précis de l’Observatoire mais les caricaturaient ou les dévoyaient.

Passer de l'observatoire à l'organisme interministériel actuel, qu'est-ce que cela change ? 

C’est une régression. L’objectif principal de cet organisme est d’avoir une doctrine unique, non controversée, descendant du haut vers le bas, une tendance très rigide qui prône un catéchisme de la laïcité. Les documents du conseil des sages comme par exemple le vadémécum peuvent être des documents utiles, d’autres en revanche font de la laïcité quelque chose de construit par le ministère et non par le droit et la jurisprudence. Or, ce n’est pas au ministère seul de dire ce qu’est la laïcité. L’Observatoire n’était pas là pour porter la parole du gouvernement mais pour poser un diagnostic. D’autre part, le comité parle d’administrer la laïcité, qu’est-ce que cela signifie ? On administre des cultes parce qu’il y a séparation entre les églises et l’État mais on n’administre pas la laïcité. Est-ce à dire qu’il y a séparation entre la laïcité et l’État ? Sans compter que le pilotage et la prise des décisions du comité, du fait de sa composition et des modalités de réunion vont s’avérer très compliqués.

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Ce désaccord montre qu'il existe des conceptions divergentes de la laïcité. Quelles sont-elles ? Quels sont les points de friction ? 

On est dans un combat pour une certaine vision de la laïcité. Il y a la laïcité de l’interdiction, une police de la pensée qui vise toutes les voix qui peuvent être divergentes en les disqualifiant et les traitant d’islamophobe, d’islamo-gauchiste, de séparatiste, d’islamiste radical… C’est une bataille politique où un certain nombre de leaders d’opinion disent détenir la vérité et se déclarent opprimés. « On ne vous dit rien, on vous cache tout, cela va très mal, c’était mieux avant, on est train de se faire islamiser ». Ce sont toutes les doctrines traditionnelles de la droite et de l’extrême-droite qui ressurgissent. Or, la réalité est plus compliquée que ça. Il y a en effet des situations où il y a des pressions terribles auxquelles il faut mettre fin, ce qui ne suppose pas toujours une loi nouvelle mais l’application de la loi existante avec fermeté et sérénité. Il y a aussi un débat sur ce qu’on entend par atteinte à la laïcité. Comment la mesurer, qui doit le faire, qui doit en discuter ? La laïcité, c’est du droit et des devoirs. Avoir des expressions diversifiées est même une force de la laïcité. Je reprendrais la maxime de Condorcet « Nous ne voulons pas que les hommes pensent comme nous, nous voulons qu’ils apprennent à penser par eux-mêmes ».

Quelles forces se sont opposées au moment de cette dissolution ? Qu'est-ce que cela dit de la vision de la laïcité en France ? 

L’Observatoire a été soutenu par un front de défense de la laïcité extrêmement large avec pour les partis politiques, des formes de soutien parfois majoritaires, parfois minoritaires. Il a été condamné par le Printemps républicain qui a des relais très puissants dans le monde politique et médiatique, notamment les chaines d’informations en continu, auprès de responsables politiques dans presque toutes les formations politiques, certains par conviction, d’autres par opportunisme. En droit, il n’a jamais été dit que l’Observatoire se trompait, très souvent il a été rejoint par l’avis du Conseil d’État ou de la Cour européenne des droits de l’homme. Les attaques ont été de plus en plus violentes, surtout après l’assassinat de Samuel Paty, y compris de la part de responsables ministériels. Mais ce qui est encourageant, c’est le constat que les Français sont attachés à la laïcité. C’est une très grande et très heureuse surprise. C’est un acquis qui doit être préservé des gens qui l’instrumentalisent pour en faire un outil de combat politique dans un but de radicalisation.

Ces visions sont-elles identifiables politiquement ? 

Parfois les personnes ont des positions ambiguës, flottantes, ce qui est respectable car il n’y a pas une doctrine armée. Les forces de gauche globalement portent la même vision ou une vision proche de la laïcité que défend et promeut la Vigie. La République en marche est très divisée, une majorité reste sur une ligne plutôt libérale mais une autre sur une ligne où il faudrait interdire le foulard partout, tout le temps. Selon cette dernière, la France a peur de l’insécurité, du terrorisme, donc il faut être dur, surtout en paroles. Les maires et députés de terrain sont beaucoup plus raisonnables. Le Front national a été le premier à reparler de laïcité, une laïcité qui passe de l’anti-étranger, anti-immigration à une laïcité anti-arabe, anti-musulman. Puis Zemmour est apparu dans le débat politique. Dans tout cela, le Président et le gouvernement ne veulent pas apparaître comme étant plus faibles que les autres.

Ces différences posent-elles un enjeu démocratique ? 

Oui et cela nécessite de réaffirmer les grands principes qui forment l’identité de la France, l’identité des droits de l’homme, de la laïcité, de l’intégration. Une identité qui n’est pas celle prônée par un certain nombre de gens de droite ou d’extrême droite. C’est une bataille idéologique et politique dont l’enjeu est de savoir quel genre de France on veut. Et chaque fois que sera interdit quelque chose pour un motif religieux, n’oublions pas qu’un même raisonnement peut conduire demain un Président ou une Présidente d’en faire autant pour un motif syndical ou politique. Il y a un risque de perte de libertés et pas seulement de liberté de conscience. 

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Pour votre part, qu'est-ce que la laïcité ? 

La laïcité ce n’est pas une vision où le multiculturalisme serait une fin en soi, l’unité de la France c’est autre chose, c’est une nation, une république. Ce n’est pas une assimilation, on ne veut pas que tout le monde se ressemble, c’est une France de l’intégration où chacun sans perdre ses valeurs, son histoire, ses attachements, trouve sa place et est reconnu à égalité de droits et de devoirs. Un certain nombre de gens très différents oublient que la laïcité est le produit de l’histoire française, quelque chose dont on peut être fier. La laïcité repose sur un équilibre, s’efforce de concilier les libertés individuelles et le bon fonctionnement collectif, la liberté de croire ou de ne pas croire, de changer de religion, de pratiquer sa religion, d’exprimer ses convictions mêmes religieuses pourvu qu’on ne trouble pas l’ordre public. En même temps, la République a le droit et le devoir de se protéger de ceux qui veulent enfreindre ces règles, les mettre à bas. La laïcité est un outil politique, organisationnel, juridique qui permet de se protéger d’un certains nombres d’attaques. Mais c’est aussi ce qui construit la maison commune, la citoyenneté.

Quels en sont les principaux repères historiques ? 

La Renaissance, certains pourraient s’en étonner, est le premier repère qui préfigure toute la démarche de la laïcité. Des hommes et quelques femmes décident de penser par eux-mêmes, de ne pas tenir comme acquis un dogme scientifique ou religieux, ils font appel à la raison et non à l’émotion. Il y a aussi le siècle des Lumières et la franc-maçonnerie qui ont eu très tôt des aspirations laïques et jouent un rôle influent dans tout le pays. Viennent ensuite la Révolution française, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, les grands droits laïques pour l’éducation avec Jules Ferry et la loi de 1905 avec une conception d’équilibre. Puis la loi Debré en 1959 et la loi de 2004 interdisant le port de tout signe ou tenue manifestant ostensiblement l’appartenance religieuse à l’école publique. C’est une histoire mouvementée faite de combats incessants.

Ces controverses publiques peuvent-elles avoir des influences sur l'école ? 

Oui bien sûr, l’école est dans le champ de la nation, de la vie de la république. L’école est au premier rang. C’est là que se joue l’avenir de nos enfants, y compris comme citoyens, mais aussi celui de la laïcité. Les pressions sont fortes pour que l’on accommode la laïcité à la sauce de certains. Les personnels éducatifs au sens large résistent aux pressions extérieures. L’Éducation nationale est un milieu dans lequel le respect des règles communes est appliqué et reconnu. Mais ces débats rendent encore plus difficile la tâche des enseignants, des chefs d’établissement qui entendent tellement de sons contradictoires. C’est pourquoi il faut veiller à ne rien souscrire à ce qui serait contraire au droit.

L'actuelle campagne de communication du ministère de l'éducation nationale peut-elle permettre de parler sereinement de la laïcité à l'école ? 

Elle repose sur une monumentale erreur politique et juridique. Au premier abord c’est plutôt sympathique, on voit des jeunes mélangés, souriants, on se dit que c’est positif. Quand on regarde de plus près, on s’aperçoit qu’il y a une surreprésentation d’enfants dont le prénom, le teint, la couleur de peau laissent comprendre qu’ils sont issus de la diversité. Cela veut-il dire que les musulmans ne sont pas comme les autres ? Les enfants repèrent très bien toutes ces discriminations et cela ne crée pas un climat serein. Mais il y a plus grave encore, quand on dit « un garçon et une fille, l’air épanoui, en train de rire à une même histoire, c’est ça la laïcité ». Mais non, la laïcité c’est qu’un tel peut rire d’une chose et un tel d’une autre. La laïcité cela permet de s’épanouir dans ses convictions, ses potentiels, dans ce qui plaît ou ne plaît pas. Ce n’est pas une chape uniformatrice. Le danger est énorme. Sur huit affiches, une seule est en rapport avec la laïcité, « la laïcité c’est ce qui permet de donner le même enseignement à ceux qui n’ont pas la même conviction ».

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En quoi l'école a-t-elle besoin pour éduquer les enfants aux principes de la laïcité ? 

Il faudrait un discours homogène et unique, ce qui n’est pas le cas. Or il est évident que les ministres ne sont pas tous d’accord sur la laïcité. Mais surtout il y a des propos qui sont des interprétations personnelles de la laïcité et qui ne sont pas conformes à la loi, la jurisprudence ou les instructions du ministère, cela créé le doute. Il n’y a pas de vision claire et les polémiques exacerbent les visions fausses. Les personnels peuvent se référer au vadémécum, à la Vigie pour avoir des instruments objectifs pour déterminer les positions. Mais surtout, il faut arrêter de demander tout à l’école, arrêter la multiplication des journées à thème, on ne peut plus passer son temps à cela. Il faut trouver une autre manière de faire, identifier des priorités, et la laïcité est une priorité parce que c’est cela qui fabrique des citoyens. Il faut aussi donner des moyens en temps, en formation et fournir plus d’outils.

Récemment, de nouvelles terminologies se sont imposées dans le débat public : islamophobie et islamo-gauchisme, pouvez-vous les définir ? Qui utilise ces terminologies et à quelle fin ? 

Il y a probablement toujours dans le vocabulaire politique et particulièrement dans celui lié à la laïcité des utilisations de mots pour définir une opinion et pour en stigmatiser une autre. Quand on dit islamisme, on n’entend pas une description des contenus de la religion et de ses pratiques, comme ça l’est pour le christianisme ou le judaïsme, le mot islamisme est tout de suite piégé. Si on utilise le mot islamisme au sens de description d’un état de fait, on est tout de suite soupçonné de soutenir des gens qui veulent la main mise d’une religion, en l’occurrence l’islam sur la loi républicaine. Historiquement, islamophobie est une description par des scientifiques du fait de ne pas aimer l’islam ou de ne pas aimer les musulmans. C’est aussi devenu un outil politique dans la bouche de celles et ceux qui ne supportaient pas certaines critiques de l’islam. On a le droit de critiquer l’islam, les musulmans, les libres penseurs, le christianisme… Ce qu’on n’a pas le droit, c’est d’inciter à la haine, à la violence ou d’avoir des propos racistes. Cela a été investi par certains militants de la laïcité comme un terrain de combat. À mon avis, ce n’est pas forcément la bonne solution parce que si l’on joue dans le langage des gens qu’on critique, on reste prisonnier de ce langage. L’islamo-gauchisme est quant à lui, une invention organisée dans certains cercles proches du Printemps républicain, pour disqualifier tous les gens qui ont une position qui n’est pas la leur sur l’islam et l’université. Qu’il y ait des pressions dans l’Université cela est réel, le problème du point de vue de la République est : est-ce qu’il y a place pour le débat ? On a le droit d’avoir des opinions différentes, surtout à l’Université qui est l’expression de la liberté. Le débat fait partie de la formation des citoyens. Ce qui n’est pas admissible, c’est d’exclure le débat. Les seules paroles interdites sont celles qui poussent à la haine, à la violence qu’elle soit religieuse ou pas. La vraie question est qu’il ne doit pas y avoir de monopole de la parole, que cela soit par les uns ou par les autres, les deux paroles doivent pouvoir s’exprimer.

Les enfants sont très réceptifs à ce que véhiculent les médias. L'intensité de polémiques peut-elle faire obstacle aux enseignements scolaires en la matière, ou brouiller le message porté par l'école ? 

Cela risque de brouiller le message porté par l’école parce que les élèves sont très sensibles à l’air du temps ou à la répétition de certaines phrases ou thèses du genre « c’était mieux avant, ça va très mal ». Les adultes structurés idéologiquement finissent par s’imbiber de ce discours, cela biaise leur jugement mais encore plus celui des enfants et des jeunes. La tâche extrêmement difficile de l’école est de résister à cela.

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La polémique sur l'origine des prénoms ne risque-t-elle pas de générer un sentiment d'exclusion chez certains enfants ? 

Si bien sûr, cela est ressenti comme discriminatoire et stigmatisant. On sait très bien que le débat autour de la loi dite « contre le séparatisme » démarrait autour du séparatisme mais visait l’islam. De la même manière lorsque est évoquée la problématique des parents accompagnateurs, on ne parle pas de tous les parents mais sont visées les mamans qui portent le voile, les enfants le savent. Les enseignants ont besoin de formation pour expliquer ce qu’est la laïcité en général et encore plus pour répondre à ces inquiétudes.

Comment définiriez-vous la loi dite "contre le séparatisme" ? Peut-on parler de "régression laïque" ? 

On peut parler de régression laïque parce que le volet lutte contre les discriminations n’a pas été développé. Cette loi vise à répondre à une préoccupation partiellement vraie. Il existe en effet des secteurs dans le pays où une certaine vision de la religion musulmane tend à se substituer à la loi commune. Ce n’est pas général, c’est très loin d’être majoritaire mais cela existe. Si le besoin de plus de transparence, de clarté dans la partie religieuse est indiscutable, est-ce que la loi est bien adaptée ? Il peut y avoir des doutes. Est-ce que cette loi ne porte pas atteinte à la liberté associative, à la liberté de conscience ? Cela se discute. Le problème est réel mais il est très grave d’en faire un problème majoritaire et d’y répondre par une loi ressentie comme discriminatoire. Il aurait été plus porteur de faire une loi sur les sujets de prévention des équilibres de liberté.

Peut-on éviter l'hégémonie d'une conception radicale de la laïcité ? 

Oui, on reste toujours un pays où on a le droit de critiquer toutes les convictions pourvu qu’on ne porte pas atteinte à l’ordre public ou à la liberté des autres. Un pays où il y a des règles qui permettent de fonctionner collectivement. Cet équilibre est plutôt bien vécu dans des milliers d’établissement scolaires en France et de cela on n’en parle jamais. Il faut poursuivre le combat pour à la fois comprendre, analyser et porter la laïcité au sein des établissements scolaires. Poursuivre également le chantier de la mixité sociale et scolaire. Il y a des réussites formidables dont on peut s’inspirer. Il faut également s’appuyer sur la mobilisation syndicale et politique qui défend cette vision de la laïcité.