À propos des évaluations standardisées

Mis à jour le 01.09.18

min de lecture

Deux questions à Pierre Merle*, Professeur de sociologie à l'ESPE de Bretagne dans le cadre d'une publication du SNUipp sur la question de l'évaluation des élèves.

Une même évaluation peut-elle servir à évaluer le système éducatif et le progrès des élèves ?

Les évaluations standardisées des compétences des élèves sont réalisées soit par le ministère, soit dans le cadre d’évaluations internationales. Le but de ces évaluations est d’établir des bilans réguliers et de comparer ceux-ci. Ces évaluations font souvent l’objet d’une instrumentalisation politique. À partir d’interprétations sommaires, le ministère décide parfois de recentrer davantage les apprentissages sur « les fondamentaux ».
Ces évaluations ne sont pas appropriées pour guider le travail de l’enseignant dans sa classe. Celui-ci a besoin d’évaluations régulières beaucoup plus précises, en rapport direct avec ses séquences d’apprentissage afin de construire les feed-back nécessaires à l’égard des élèves pour lesquels les compétences visées ne sont que partiellement, voire pas du tout, atteintes. Penser que le travail pédagogique du professeur dans sa classe puisse être piloté par des évaluations nationales manifeste une méconnaissance du travail pédagogique effectif que le professeur doit réaliser.

« Penser que le travail pédagogique du professeur dans sa classe puisse être piloté par des évaluations nationales manifeste une méconnaissance du travail pédagogique effectif que le professeur doit réaliser »

À quelles conditions une évaluation est-elle au service des élèves et des enseignants ?

Pour être utile, cette évaluation doit être anonyme afin d’éviter les « comparaisons sociales forcées » entre élèves. Celles-ci réduisent l’estime de soi scolaire des élèves les plus faibles et leur capacité d’engagement dans la tâche. Une évaluation efficace nécessite aussi de créer du bien-être éducationnel et un climat de confiance. Le stress et la peur de l’échec sont à l’origine de « pensées distractives », diminuent les ressources intentionnelles des élèves, et freinent leurs progressions scolaires.

Cette évaluation efficace doit être associée à une « pédagogie explicite », fondée sur une alternance, propre à chaque classe, entre d’une part le guidage collectif des élèves et, d’autre part, leur mise en autonomie progressive associée à un guidage individualisé. La réduction des effectifs des classes favorise de façon sensible la mise en œuvre de cette pédagogie.

*Dernier ouvrage de Pierre Merle : « Les pratiques d'évaluation scolaire. Historique, difficultés, perspectives». PUF, 2018