Vraiment prioritaire ?

Mis à jour le 13.05.19

min de lecture

L'éducation prioritaire a connu de nombreuses réformes et reste un enjeu de société

La nouvelle carte de l’éducation prioritaire attendue pour 2018-2019 a été repoussée d’un an par le ministère. Mais à ce jour, toujours aucune information. Pour autant, plusieurs rapports sont sur le bureau du ministre, tels que celui de la Cour des comptes ou encore celui de France stratégie * qui pointe du doigt un certain décalage : « 700 000 élèves sont scolarisés dans une école dont le label ne semble pas correspondre aux caractéristiques sociales de son quartier ». Signes qu’au ministère un projet est dans les tuyaux. Rien de rassurant lorsque l’on connaît la méthode Blanquer : des annonces sans aucune consultation. Et puis, on se souvient de la dernière carte de l’éducation prioritaire qui a laissé de côté de nombreuses écoles, dites « orphelines ». Des écoles qui accueillent des élèves vivant dans des quartiers en difficultés socio-économiques, sans pour autant que leur collège de rattachement ne soit classé en éducation prioritaire. Il faut donc un meilleur ciblage, au plus près de la réalité des écoles, c’est l’un des enjeux de la future carte. Ce qui serait largement possible si l’éducation prioritaire prenait en compte la cartographie précise des îlots de pauvreté sur le territoire établie par trente ans de politique de la ville. 

Un manque cruel de moyens

La politique d’éducation prioritaire est un véritable enjeu de société qui ne date pas d’hier. Alain Savary, alors ministre de l’Éducation nationale, en présentait les objectifs en 1981 : donner plus à ceux qui en ont le plus besoin. Belle promesse. L’EP a connu plusieurs réformes se fondant sur deux visions opposées plus politiques que pédagogiques, l’une prônant la réussite de tous les élèves, l’autre privilégiant le mérite et la sélection. Mais avec toujours une même constante : un manque cruel de moyens. Sans création de postes à la hauteur, toujours en dessous des besoins, en récupérant des emplois dans le rural ou encore les « Plus de maîtres ».
Après plus de trente ans d’éducation prioritaire, le constat est fait de la persistance d’un noyau dur d’élèves en difficulté à l’entrée au collège. Malgré une politique spécifique, les élèves scolarisés dans un établissement relevant de l’EP sont plus en échec que les autres. Cela signe-t-il l’échec de l’éducation prioritaire ? Dans un contexte d’accroissement des inégalités, de nombreuses études montrent que les écarts entre élèves scolarisés en EP et ceux hors du dispositif ne se creusent pas. Comme le note la DEPP dans son étude Éducation prioritaire – Scolarité des élèves au collège de 2007 à 2012 publiée en décembre 2017, « Les dispositifs d’éducation prioritaire semblent parvenir à contenir l’effet de la très forte concentration de difficultés sociales qui (…) devrait provoquer une forte dégradation des performances dans ces établissements ». Cette politique de discrimination positive a donc des effets non négligeables, encore faut-il lui en donner les réels moyens. Ainsi, si réforme il doit y avoir, il faut qu’elle permette de prévenir l’échec dès la maternelle, de scolariser les élèves de moins de trois ans, de diminuer les effectifs, de mieux former les enseignants, de maintenir allègement de service et les plus de maîtres pour une construction collective de réponses à la difficulté scolaire… C’est de cela dont a besoin l’EP pour mener à bien sa mission : faire progresser les élèves dans les établissements les plus défavorisés dans un objectif de réduction des inégalités. 

* Note d’analyse n° 76 de France Stratégie, « Écoles primaires : mieux adapter les moyens aux territoires », avril 2019.

Écrire à la rédaction

Merci de renseigner/corriger les éléments suivants :

  • votre prénom n'a pas été saisi correctement
  • votre nom n'a pas été saisi correctement
  • votre adresse email n'a pas été saisie correctement
  • le sujet n'a pas été saisi correctement
  • votre message n'a pas été saisi correctement

Merci de votre message, nous reviendrons vers vous dès que possible