Un savoir-parler à enseigner

Mis à jour le 04.12.21

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Interview de Martine Jaubert, professeur des universités en sciences du langage

MARTINE JAUBERT Professeure des universités en sciences du langage.

FsC 478 Martine Jaubert

Existe-t-il un "savoir-parler" à enseigner ? 

Souvent le langage est un point aveugle de l’enseignement car considéré comme une évidence. Les enfants arrivent à l’école avec des usages familiaux différents qu’il s’agit de ne pas stigmatiser. L’école va avoir pour but de dépasser ces premiers moyens langagiers pour en construire d’autres. Souvent le langage ordinaire relève de conversations, l’école a pour mission de le faire entrer dans des discours spécifiques aux savoirs. Or, pour les élèves, cerner les langages propres à chaque discipline est difficile et nécessite des espaces de tâtonnements, d’essais de discours à l’oral comme à l’écrit. Il s’agit de passer du langage ordinaire à des discours particuliers qui témoignent de l’entrée dans différents mondes, avec différents savoirs et donc différents objets de discours, ce que nous appelons « secondariser ».

Le langage est donc disciplinaire ? 

Le langage suppose nécessairement un point de vue, même si l’on ne s’en rend pas compte. Il est contextualisé et s’articule à une activité réflexive permettant de se positionner dans une discipline. Par exemple, je ne vais pas parler de l’escargot de la même manière selon si je travaille sur la compréhension du « voyage de l’escargot » en littérature ; si, en écriture je cherche les correspondances phonie-graphies du mot ou si je cherche à connaître l’alimentation du gastéropode en sciences. Passer du coin lecture à la table et au vivarium n’est pas un simple changement de lieu. Les objets de savoirs et donc les manières de les dire, à l’oral comme à l’écrit, sont différents. D’ailleurs, ces usages langagiers diffèrent selon les activités humaines au-delà de l’école.

Quels gestes professionnels recommander ? 

Il s’agit d’aider l’enfant par un fort étayage à s’ancrer dans le domaine d’activité. Or, il y a dans une journée d’élève des changements très réguliers de discipline. En début de séance, récapituler ce que l’on sait déjà, le vocabulaire utilisé, les questions à se poser permet de circonscrire le discours attendu. De même, les écrits intermédiaires partagés, avec des mutualisations des textes entre élèves, entraînent des discussions autour des productions élaborant collectivement le discours acceptable. C’est aux élèves de s’essayer à l’écrire et de le verbaliser. La dictée à l’adulte, y compris avec des élèves d’élémentaire, permet également d’observer les écarts de langage pour déterminer celui propre à la discipline. Reformuler les propos, les comparer… revient à construire un rapport conscient au langage pour choisir dans les palettes des possibles.

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