Signes et pratiques
Mis à jour le 02.10.22
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Itv de Sigolène Couchot-Schiex, professeur en sciences de l'éducation
SIGOLÈNE COUCHOT-SCHIEX est professeure en sciences de l’éducation à Cergy Paris Université.
Quels sont les signes du harcèlement ?
Avec d’autres chercheurs, nous avons trouvé trois métaphores. L’iceberg quand on ne voyait qu’une toute petite partie de ce qui se passait. Les petites gouttes d’eau, quand c’est très fragile et très éphémère. Elles sont peu perceptibles pour les adultes et demandent beaucoup d’attention. La troisième métaphore, c’est l’effet tsunami. L’attroupement au moment d’arriver en classe le matin qui commence à l’extérieur et qui peut se poursuivre dans la cour de récréation et les couloirs. Parfois, personne ne s’en rend compte mais les photos et les insultes tournent sur les réseaux sociaux ou dans l’établissement. Ce qui ressort de nos études est que le cyberharcèlement devient prégnant aussi à l’école, et ce dès le CE1. Harcèlement et cyberharcèlement sont la même chose mais passent par deux canaux de communication qui peuvent aussi être simultanés. Parfois aucun adulte ne met le doigt dessus alors que l’enfant est moqué en classe ou empêché de travailler. On connaît les signes mais est-ce que l’on se sent concerné en tant qu’adulte et comment est-ce possible de ne pas voir ?
Quelles pratiques mettre en place ?
Les élèves peuvent être tour à tour témoin, harceleur et victime. Ils ont d’ailleurs souvent des doutes sur le rôle qu’ils jouent. Il ne faut pas dissocier les trois rôles. C’est en faisant parler l’enfant à partir des rôles qu’on arrive vraiment à identifier quelle est l’agression dont ils se perçoivent victimes… ou celle qu’ils commettent sans parfois s’en rendre compte. Dans l’ouvrage publié avec Benjamin Moignard, Jeunesse, genre et violences 2.0, nous proposons des pratiques à mettre en place à l’école, notamment du travail avec une équipe pluri-catégorielle et les élèves. Un agent de service à la cantine peut aussi percevoir des choses. Les ateliers sur le cyberharcèlement, qui réunissent parents et enfants, ont beaucoup de succès. Il faut travailler sur une triangulation personnels de l’éducation, parents, enfants autour de ce que fait l’enfant, sans jugement moral des adultes. Le dispositif pHARe est « louable » mais ce qui m’a frappé en observant sa description, est sa limite. Il est très descendant et ne prend pas en compte le contexte spécifique local, c’est-à-dire toute la sociologie de l’établissement et des élèves. Il n’y a pas suffisamment de lien entre les différents acteurs, entre les différents référents adultes, avec les élèves ambassadeurs. Il manque quelque chose qui passe par le collectif.
Quelle formation pour les PE ?
Une formation sur Internet n’est pas suffisante. Certaines formations sont orientées plutôt du point de vue psychologique et sur l’empathie : c’est intéressant mais la question c’est l’empathie vers quoi ? Il faut travailler sur le respect de la place de chacun et de son épanouissement. Je suis très favorable à ce qu’il y ait des formations in situ dans l’établissement. Les PE savent ce qu’il s’y passe mais il y a beaucoup de confusion. Il faut les aider à identifier, à caractériser et à qualifier… De quoi parle-t-on exactement ? Comprendre les mécanismes aussi – comme pour le sexisme – pour pouvoir, ensuite, prendre en charge.