"Renverser l'auto-dévalorisation"

Mis à jour le 17.01.19

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Jacques Bernardin, docteur en sciences de l’éducation et président du GFEN

QUELLES SONT LES PISTES POUR AMÉLIORER LA RELATION ÉCOLE-FAMILLES ? 

Sans doute faut-il d’abord convaincre de ses bénéfices. Souvent, les parents de milieux populaires rechignent à venir à l’école car ils s’estiment mal placés, peu légitimes ni outillés pour aider leur enfant. Établir une relation de confiance est propice à l’engagement sans réserve de l’élève dans les apprentissages. A contrario, rien de pire que le doute ou la suspicion de ne pas « faire ce qu’il faut » voire le déni réciproque. Par ailleurs, les parents ayant peu fréquenté l’école n’imaginent pas que leur appui est indispensable. Or, la façon dont l’école est parlée à la maison, dont la scolarité est préparée, suivie et accompagnée, est un facteur clé pour l’implication et les progrès, au-delà même de toute aide technique. Enfin, harmoniser les interventions éducatives – sur le plan des comportements ou du travail du soir – permet d’éviter les contradictions, de coordonner les appuis et d’en redoubler les effets.

QUELLE POSTURE PROFESSIONNELLE CHEZ L’ENSEIGNANT ? 

Comme à l’égard des élèves, une posture d’accueil et d’attention, respectueuse des singularités : les parents sont sensibles à la façon dont ils sont perçus. Il faut se départir des stéréotypes sociaux et des postures de surplomb, s’efforcer d’entendre et de comprendre les propos et attitudes des parents… y compris pour pouvoir les discuter si nécessaire. Rencontrer les parents pour les connaître, les reconnaître comme partenaires et les informer des acquisitions comme des progrès : tout cela permet d’éclaircir les usages, pratiques et attendus de l’école. Plus encore, on peut solliciter leur expérience afin de renverser l’auto-dévalorisation qui les caractérise, au nom de leurs souvenirs scolaires, de leur faible qualification ou de leur niveau de maîtrise du français. L’école peut ainsi œuvrer à la promotion des parents, à leurs propres yeux comme à ceux de leurs enfants.

LES DEVOIRS SONT-ILS UN ENJEU DE CETTE RELATION ? 

Trace tangible de ce que l’enfant fait à l’école et y apprend, le travail du soir est – à l’épreuve des faits – un facteur de tension voire de conflits intra-familiaux. L’enfant peut être accusé de ne pas avoir assez écouté, de n’avoir rien compris, d’avoir mal noté ce qu’il fallait faire. Faute de clarification suffisante de la demande, le parent voulant bien faire peut « en rajouter » ou biaiser la nature du travail demandé, soumettant alors l’enfant à des exigences contradictoires. Le parent peut aussi être mis en difficulté, soit parce qu’il intervient « à côté » de ce qui a été signifié en classe ou n’en comprend pas la logique « Non, maîtresse a dit… », soit parce qu’il est désemparé face à la demande « Tu sais pas, t’es nul !... » Autant de facteurs de ressentiment à l’égard d’une école qui met l’un ou l’autre en difficulté, rejouant des processus de disqualification déjà connus et douloureusement vécus. Mais cela n’est pas fatal. L’école peut éclaircir les règles du jeu…

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