RASED, plus que jamais

Mis à jour le 16.06.20

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Ces dispositifs pour accompagner les élèves en grande difficulté scolaire sont en danger

Dispositifs spécifiques pour accompagner les élèves en grande difficulté scolaire, les RASED sont confrontés à une nouvelle diminution de postes alors qu’après la crise, les besoins d’aide des équipes enseignantes et des élèves augmentent

L’érosion se poursuit. Avec 72 postes de RASED supprimés en carte scolaire, il y aura toujours moins de personnels spécialisés dans les écoles à la prochaine rentrée. Entre 2007 et 2012, la période de la grande purge opérée sous la présidence Sarkozy, le nombre de postes affecté aux Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté aura diminué de 5 000, soit plus du tiers des effectifs. Durant les cinq années suivantes, la baisse a été stoppée sans qu’il n’y ait eu de véritable relance du dispositif. Mais elle a repris progressivement depuis 2017, à plus faible dose il est vrai.

Quand ils ont vu le jour en 1990 sur les fondations jetées depuis 1970 par les Groupes d’aide psychopédagogique, les RASED ont été affectés à une mission simple à définir : « prévenir et remédier aux difficultés scolaires persistantes qui résistent aux aides apportées par les enseignants des classes ». Leur organisation tricéphale se compose d’un maître E spécialisé dans les aides à dominante pédagogique, d’un maître G spécialisé dans l’aide relationnelle et d’un psychologue pour le suivi et l’accompagnement psychologique des élèves. Là où les réseaux complets existent encore, les enseignantes et les enseignants y trouvent des points d’appui importants pour accompagner les élèves en grande difficulté scolaire.

Une ressource face à la grande difficulté

En témoigne Francis Jauset, rééducateur du réseau Gagarine de Sainte-Geneviève-des-Bois (91). Lors de réunions, « les enseignants nous présentent les élèves qui les inquiètent. Ces moments permettent un croisement des regards et une réponse adaptée aux besoins spécifiques de chaque enfant », explique-t-il. « Souvent on ne sait pas ce qui bloque chez l’élève et comment y remédier. Les enseignants spécialisés des RASED ont toujours une meilleure réponse face à la difficulté, des stratégies et plus de temps avec l’élève qui peut avancer à son rythme », abonde Samira Kerroumi, enseignante en CE1 à l’école élémentaire Maurice Barrès dans la Rep+ de Borny (57), insistant sur l’apport des réseaux à travers leur approche des élèves en difficulté.

Corinne Moy, formatrice ASH à Paris, détaille sur un plan plus formel l’apport des réseaux. Pour elle, « la position de tiers du RASED dans les situations de grande difficulté scolaire » est « pour analyser les situations de la grande difficulté et pour décider des réponses adaptées ». « L’autre point fort, c’est la pluralité des regards et des approches, à la fois du champ de la pédagogie, de la psychologie et de la psychopédagogie », ajoute-t-elle. Bien évidemment, au-delà des PE, ce sont les élèves qui doivent en être les grands bénéficiaires car cette action doit contribuer à leur réussite scolaire.

En manque de reconnaissance

Ce point de vue fait toutefois controverse. En 2017, prélude à l’entrée en lice au ministère de Jean-Michel Blanquer, l’Institut de recherche sur l’éducation (Iredu) publiait une étude mettant en cause l’efficacité des RASED : trop d’élèves pris en charge, stigmatisation de ces enfants impactant le déroulement de leur scolarité et au final, des résultats « neutres ». Dans une tribune parue dans Les cahiers pédagogiques, Thérèse Auzou-Caillement de la Fédération nationale des associations de maîtres E, faisait part de sa « stupeur » et de sa « colère » devant une « étude quantitative », qui ne tenait pas compte « des réalités du terrain », étant basée sur des données datant de… 1997. Du coup, l’étude ignore les évolutions du contexte d’exercice des missions des RASED : un périmètre élargi souvent à l’échelle d’une circonscription, avec un plus grand nombre d’élèves à suivre et les saignées dont ont souffert les personnels, notamment les maîtres G de plus en plus rares dans les écoles.

Des palliatifs inadaptés

La fonte des effectifs a été justifiée au fil des ans par la mise en place de nouveaux dispositifs : l’aide personnalisée, les activités pédagogiques complémentaires, le dédoublement des CP et CE1 en Rep+… censés pallier l’affaiblissement des RASED. C’était oublier que si certaines de ces mesures pouvaient être utiles pour traiter de la difficulté « ordinaire », elles ne sont pas adaptées à la prise en charge de la grande difficulté scolaire. Alors que, comme le reprécise le président du GFEN Jacques Bernardin, « le RASED renouvelle le point de vue sur la difficulté, mais aussi l’approche pédagogique. Il permet par son action de relancer la dynamique d’apprentissage, de développement. Il participe également au développement professionnel dès lors qu’il peut échanger avec les enseignants » (lire p19). Voilà pourquoi le collectif RASED, créé en 2008 sur les décombres des mesures Darcos, dénonce un « manque manifeste de personnels ». Car assurément pour lui, les élèves ont plus que jamais besoin des RASED.

RASED

LA FORCE DU COLLECTIF

Le collectif national RASED, dont le SNUipp-FSU fait partie, défend et promeut les RASED depuis plus de dix ans. Il dénonce les suppressions de postes (environ 5000 supprimés depuis 2007, soit un tiers des effectifs) qui ont amputé le dispositif. Et malgré la circulaire de 2014, toujours en vigueur, qui réaffirmait les missions spécifiques des trois professions de RASED, il n’y a toujours pas de relance. La réorientation des missions vers du simple conseil aux enseignant.e.s fragilise le RASED, notamment dans ses missions de prévention et de remédiation en réduisant les réponses apportées aux élèves. Elle met à mal la co-construction au sein de l’équipe enseignante, le lien avec les familles et le travail avec les actrices et acteurs du médico-social. Avec 80 suppressions de postes cette année, le collectif s’inquiète. Car, si les besoins étaient présents avant la crise, il faudrait à présent des moyens accrus pour accompagner les équipes et les élèves les plus fragiles à l’occasion d’une rentrée qui s’annonce difficile.

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