Maternelle en Ehpad

Mis à jour le 22.05.23

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ça swingue entre les générations à Barlin dans le Pas-de-Calais

À Barlin dans le Pas-de-Calais, un Ehpad accueille une école maternelle de deux classes dans ses murs : une liaison faite pour durer.

Depuis janvier 2023, les deux classes de maternelle de l’école Maryse Bastié de Barlin, petite commune du bassin minier du Pas-de-Calais, ont élu domicile à l’Ehpad les Charmilles, établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Après des temps de partage ponctués du goûter mensuel des anniversaires, de galettes des rois, crêpes et chasse aux œufs, c’est la première fois ce matin de mai que les 11 élèves de toute petite et petite sections vont participer à une activité avec des résident•es. Élisabeth Notelet, directrice et enseignante et Malika Prudhomme, animatrice à l’Ehpad, ont croisé leurs compétences pour intégrer les enfants à l’atelier hebdomadaire de gym douce des personnes âgées. Les bambins poussent la porte de la classe qui ouvre directement dans la salle d’animation de l’Eh-pad où les attendent avec impatience « les mamies et les papis ». Ils se reconnaissent, les habitudes et les affinités commencent à s’installer. Les petites chaises se glissent entre les fauteuils et le « swing des bras » peut commencer. Mêlant le geste à la parole, les deux adultes mènent la séance : motricité et rappel des gestes de la toilette pour les aînés et schéma corporel et motricité pour les enfants. Sur une musique entraînante, le petit Martin imite Philippe qui lui lance en riant « On va être propre », tandis que Guy aide Charly à effectuer un mouvement. De retour dans la classe, un temps de regroupement permet de revoir le vocabulaire des articulations et des parties du corps, avant de retrouver les abaques. 

Un lien intergénérationnel 

Dans le cadre du projet « Bien vieillir à Barlin », Julien Dagbert, maire de la commune travaille étroitement depuis plusieurs années avec l’AHNAC**, gestionnaire de l’Ehpad et de la résidence autonome des Charmilles pour mettre en place des actions dans ce quartier peuplé de seniors. Quand en 2020, il découvre « Une vie d’écart », reportage télévisuel relatant une expérience de relation intergénérationnelle entre un Ehpad et une classe de maternelle, il veut aller plus loin. Au sortir du Covid, il réunit très vite Chrystelle Sénéchal, directrice de l’établissement et Michèle Detève, inspectrice de l’Éducation nationale. « L’école Bastié, proche de l’Ehpad, avait de faibles effectifs et un problème de cantine scolaire, la délocalisation de la maternelle a été actée rapidement », explique l’édile. Il a fallu, ensuite, convaincre les parents. « J’ai été un peu réticente au début par rapport à la mort et à l’attachement aux personnes âgées, admet Sylvana Duquesnoy, maman de Matti, mais je ne regrette pas. Il est content et il parle souvent des papis et des mamies ». De nouveaux locaux, une cantine sur place et un transport organisé du groupe scolaire à l’Ehpad pour les maternelles ont fi ni de convaincre. « Nous avons déposé un dossier dans le cadre d’un appel à projet pour la création d’un « tiers-lieu » et obtenu ainsi 150 000 euros de subvention qui ont permis à l’AHNAC, Association hospitalière Nord-Artois clinique, de procéder aux restructurations intérieures de l’Ehpad, poursuit le maire. La ville a aménagé un espace extérieur en cour d’école ». « C’est un grand projet dynamique et un partenariat parfait, commente Éric Batcave directeur du pôle médical du groupe AHNAC. L’école est un merveilleux relais intergénérationnel. On a pu créer des espaces pour faire en sorte que la vie existe ». « Afin de créer des liens, nous avons décidé qu’il fallait pour commencer un petit groupe de résidents « moteur », toujours les mêmes et une fois par semaine, explique Malika. Pour eux, c’est un moment de vie car certains ont peu de visites. Ils sont demandeurs et ils se sentent utiles ». Un alignement des planètes parfait pour un projet qui n’aura mis qu’une année à se réaliser. 

Des objectifs pédagogiques 

De leur côté, « les 23 moyens et les grands partagent une fois par semaine des ateliers jeux éducatifs avec les aînés, explique la directrice. Chaque enfant est en binôme avec un ou une résidente. Domino, loto et jeux traditionnels mais aussi des jeux qui développent la motricité fi ne, sans oublier les ateliers de peinture et de loisirs créatifs. La ferme et le jardinage occuperont la fin de l’année scolaire ». Si les enseignantes commencent à prendre bien en mains la proposition et si l’expérience est positive en termes de socialisation, la rencontre de deux mondes est parfois déstabilisante pour les enfants. Les questions de temporalité et des objectifs pédagogiques des ateliers sont prégnantes. « Une fois par semaine, c’est suffisant, affirme Caroline Vaast, enseignante. Pour les grands, le programme est chargé ». « Nous allons inscrire un axe bienveillance/inclusion/lien intergénérationnel dans le projet d’école, complète Élisabeth, mais pédagogiquement parlant, on est limité ». « La localisation pérenne de la maternelle dans l’Ehpad a dynamisé le quartier et permis à l’élémentaire de quitter les « algecos » et de réintégrer les locaux du groupe scolaire Bastié, analyse l’inspectrice. Cela devrait limiter les chutes d’effectif. Au-delà du projet médiatique, il faut qu’il y ait un intérêt pour les enfants et les enseignantes veillent à ce que l’école reste le lieu d’apprentissage. Il faut mener de front le projet intergénérationnel sans cependant occulter la liaison Grande section-CP ». Après la période de découverte où les idées viennent en faisant, tout le monde pense déjà à l’année prochaine.

FsC 490 Ehpad et maternelle

DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Les relations intergénérationnelles ont souvent été au cœur des mesures politiques pour favoriser le lien social. Mais qu’en est-il exactement au sein des Ehpad entre deux générations si éloignées qu’il est parfois difficile de les faire cohabiter ? Si ces relations
sont toujours bien acceptées et surtout attendues, qu’elles soient occupationnelles, ludiques, de réminiscence ou encore dans des relations d’aide, peu de recherches y sont consacrées. Carole Gadet, chargée des projets intergénérationnels éducation nationale et fondatrice de l’association Ensemble demain, a interrogé les relations entre élèves et seniors dans le champ scolaire. Son association vise à créer et accompagner des projets pédagogiques intergénérationnels sur la durée. ENSEMBLEDEMAIN.COM

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