Les petits coins à l'école
Mis à jour le 05.02.24
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Interview de Gladys Chicharro, sciences de l'éducation : quels enjeux ?
Gladys Chicharro est maîtresse de conférences en sciences de l’éducation, Paris 8 et co-autrice de « Les petits coins à l’école. Genre, intimité et sociabilité dans les toilettes scolaires es es », Éd. Erès, 2023.
L'autonomie des enfants aux toilettes à l'école ? quels enjeux ?
Pour les adultes, la propreté consiste en la capacité d’aller seul aux toilettes ou de savoir demander. Les textes évoquent une continence régulière et suffisante. Mais l’autonomie recouvre aussi savoir se déshabiller, se rhabiller et s’essuyer seul. Même avec la scolarisation obligatoire à 3 ans, des arrangements entre familles et école pour un accueil limité perdurent quand il y a trop « d’accidents ». Les observations confirment l’idée partagée par les enseignants que le collectif, et l’imitation des comportements, contribuent à l’apprentissage de la propreté. Pour certains enfants, elle s’acquiert à mesure qu’ils deviennent élèves, pour d’autres, notamment issus de certaines cultures, elle peut être bien plus précoce.
Une intimité souhaitable à la maternelle ?
Le respect de l’intimité de l’enfant fait consensus. En maternelle, des cloisonnettes entre cuvettes empêchent les regards voisins, mais pas ceux des enfants qui attendent. En Europe du Nord, l’intimité implique portes et murs. En France, la peur domine sur ce qui pourrait se passer aux toilettes et la sécurité s’impose. En petite section, la plupart des enfants ne sont pas préoccupés par la pudeur, même si certains refusent le passage aux toilettes ou choisissent la cuvette la plus en retrait. Par contre, dès la grande section, les élèves réclament non-mixité et portes et murs « comme à la maison ».
Des revendications d'élèves ?
En maternelle, les adultes évitent de toucher le corps des enfants, par peur d’accusation de pratique pédophilique. Mais les enfants de petite section qui ne savent pas s’essuyer s’étonnent que les adultes refusent de les aider. En élémentaire, les revendications sont presque syndicales et dressent l’inventaire des manques : toilettes et lavabos, lunette sur la cuvette, porte-manteaux, portes pleines empêchant les regards, mais aussi chasses d’eau et robinets dysfonctionnels, papier absent ou à l’entrée, qui oblige à penser à en prendre avant ou à demander aux adultes. Or les enfants s’y refusent, surtout les garçons car cette annonce publique de la défécation malmène leur intimité. Les toilettes sont aussi un lieu de sociabilité, le seul de l’école où les adultes n’entrent pas. Les élèves souhaitent le préserver. Même les filles préfèrent des aménagements plutôt que des interventions d’adultes pour ne plus être importunées par les garçons.