Les personnels alertent

Mis à jour le 19.03.24

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PE : conditions de travail dégradées et non reconnaissance du métier.

La campagne « J’alerte » de la FSU-SNUipp rend visible le mal-être des PE face à des conditions de travail dégradées et une non reconnaissance du métier. Les témoignages recueillis traduisent à la fois leur colère mais aussi leur volonté de trouver des solutions pour assurer la réussite de tous les élèves.

Depuis ces dernières décennies, les PE sont confrontés à la dégradation continue de leurs conditions de travail qui les empêchent trop souvent d’exercer correctement leur mission en faveur de la réussite de tous les élèves. Pour autant, ils ne baissent pas les bras face aux difficultés rencontrées chaque jour sur le terrain. Telle est la double conclusion de la consultation en ligne « J’alerte » lancée fin 2023 par la FSU-SNUipp. Une enquête qui s’inscrit dans le prolongement d’une mobilisation portée par les sections départementales et qui s’est traduite par 102 alertes sociales visant à interpeller les IA-Dasen sur la situation explosive qui couve dans les écoles. Une mobilisation qui a d’ailleurs contraint le gouvernement à annuler la suppression de 1 059 postes.

À travers plus de 3 000 témoignages les personnels des écoles (PE, PsyEN, AESH…) expriment au grand jour leur souffrance au travail. Parmi les principaux sujets de tension qui affectent leur quotidien, ceux liés à l’inclusion arrivent largement en tête avec 71% des alertes. « Il devient de plus en plus difficile d’enseigner avec des élèves présentant de sévères troubles du comportement qui mettent à mal la classe et ce sont les autres élèves qui en pâtissent », témoigne ainsi un PE. « Depuis quelques années, des enfants avec trouble du spectre de l’autisme sont accueillis en petite section sans aide humaine, ajoute une enseignante en maternelle. Cette situation m’empêche de faire classe et génère beaucoup de stress et de fatigue ». Une situation d’épuisement professionnel confirmée par une autre collègue qui dénonce le rythme effréné imposé par l’empilement des tâches à accomplir. « Entre activités pédagogiques complémentaires, conseils des maîtres, réunions avec les parents et les professionnels de santé, les corrections, etc., nous sommes en permanence en train de courir ». Avec 50% des motifs d’alerte, les contraintes liées au temps de travail apparaissent comme la seconde cause de la dégradation des conditions d’enseignement, tandis que les autres points de tension concernent essentiellement les rémunérations, les effectifs, les évaluations et les injonctions pédagogiques ou encore la formation.

Les PE jouent collectif dans la difficulté

La mise en œuvre d’une approche pédagogique basée sur le travail en équipe constitue souvent un moyen d’amortir le choc provoqué par des conditions d’enseignement dégradées. C’est, par exemple, la voie choisie par les PE de l’école Molière d’Alençon dans l’Orne. « Travailler collectivement est une manière de retrouver de la puissance sociale pour la profession, en fabriquant ses propres normes, en les assumant et en imposant ses choix », assure Frédéric Grimaud, docteur en sciences de l’éducation. Une méthode qui rejoint celle préconisée par la sociologue Françoise Lantheaume. « Là où les PE se portent le mieux, c’est dans des collectifs ouverts où ils peuvent délibérer sur les façons de faire."

Ainsi, une professionnalité se construit et évolue. Mais cela demande du temps et des espaces que l’institution devrait fournir dans le cadre d’une réelle formation continue notamment » . L’administration répond parfois aux interpellations des PE. Mais le manque de moyens, d’écoute et de confiance l’amène à proposer des solutions peu efficientes face aux dysfonctionnements. Selon Françoise Lantheaume, « si, actuellement, le sens du métier est mis à rude épreuve et que l’épuisement guette les PE, ils ont cependant le plus souvent plaisir à faire ce métier et montrent un engagement professionnel très grand. » Il est urgent de le reconnaître et de leur donner de véritables moyens.

FsC 496 Dossier PG2©MILLERAND-Les grenades-Naja

CHOC D’INÉGALITÉS

Sans relâche, les enseignants et enseignantes réclament des moyens pour l’école et une augmentation de leur salaire qui restent inférieurs à ceux de la moyenne de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). À ces revendications justifiées tant l’école et ses personnels vont mal, le ministère de l’EN répond « choc des savoirs ». Cette vision de l’école, loin de répondre à ces difficultés réelles, va renforcer les inégalités. Révision des programmes, réorganisation du socle commun, redoublement et abandon non avoué des cycles, labellisation de certains manuels. Le ministère persiste dans le pilotage de l’école par des évaluations nationales généralisées, qui tendent à renforcer le travail sur des compétences en français et en mathématiques, au détriment de toutes les autres. Pour s’opposer à ce « choc », le collectif « Riposte » s’est créé. Il rassemble mouvements pédagogiques, associations complémentaires de l’école, associations de parents d’élèves (FCPE), syndicats (FSU, Unsa, SGEN-CFDT, SUD éducation) et plus de 130 chercheurs, chercheuses et personnalités du monde de l’éducation. Il invite « toutes celles et tous ceux qui ne peuvent se résigner à une école du tri social, à participer à [ses] travaux pour un Grenelle alternatif ».

Le sommaire du dossier :

  • Expressions directes : Plus de 4 200 personnes ont répondu à la consultation de la FSU-SNUipp. Le constat est sans appel : les conditions de travail se dégradent et la perte de sens du métier est particulièrement prégnante.
  • Interview de Frédéric Grimaud, PE et docteur en sciences de l'éducation. Il est auteur de l'ouvrage Enseignants, les nouveaux prolétaires
  • La force du collectif : Reportage à Alençon, dans l'Orne, où le travail en équipe permet de faire face aux difficultés du quotidien
  • Inclure ensemble : Reportage à l'école élémentaire de la Côte des roses à Thionville (Moselle) où l’équipe fait vivre l’école inclusive
  • Interview de Françoise Lantheaume, sociologue et professeure des universités émérite en Sciences de l'éducation (Lyon 2).

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