Le climat scolaire : un levier

Mis à jour le 02.10.22

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Itv de Catherine Blaya professeur en sciences de l'éducation et chercheuse

                                                                             “Le climat scolaire est un levier important”

Catherine Blaya professeur de sciences de l’éducation et chercheuse à l’université Côte d’Azur, dirige l’équipe française du groupe « EU Kids oneline » sur les usages numériques et les expériences négatives des jeunes.

Dossier 485 harcèlement Blaya

Le harcèlement, un phénomène de société ? 

Le harcèlement est un problème complexe qui a des conséquences sociales en termes de santé sur les jeunes mais aussi les adultes. Les jeunes qui ont été harcelés lors de leur scolarité – mais les agresseurs aussi d’ailleurs – rencontrent, ensuite, des difficultés de socialisation, de confiance en l’autre et d’estime de soi. Le harcèlement a longtemps été considéré comme une expérience négative faisant partie de rites de passage permettant de grandir et de vivre en société, société qui serait violente par essence. Ce point de vue est encore partagé par certains. Par ailleurs, les travaux menés dans le cadre du groupe « EU kids online » montrent que pour le cyberharcèlement par exemple, ce n’est pas dans les sociétés où il y a le plus d’équipements informatiques qu’il y a le plus de harcèlement mais dans les sociétés où il y le plus de violence dans la vie courante. 

Comment l'école est-elle impactée ? 

10 % des élèves seraient harcelés dans le cadre scolaire. Les effets du harcèlement impactent les victimes, les auteurs mais aussi les témoins. Lorsque l’école n’offre pas un climat qui rassure, qui permet d’apprendre dans de bonnes conditions, ou d’exercer son métier de professionnel de l’éducation dans de bonnes conditions, toute la communauté éducative en pâtit. De plus, on sait aujourd’hui que le harcèlement et le cyberharcèlement sont corrélés, que ce qui se passe dans l’école se poursuit en ligne, et réciproquement. La prévention doit prendre en compte le côté désinhibiteur des comportements en ligne. Internet affaiblit l’impact du contrôle social et altère le sens des responsabilités. Le fait de ne pas être confronté à la souffrance de l’autre, de ne pas voir les effets sociaux de ses actes, diminue les capacités d’empathie, induit des comportements plus violents et facilite le passage à l’acte.

Le cyberharcèlement est-il aussi présent ?  

Plusieurs études menées auprès des enfants de 5 à 12 ans sur les expériences de cy-berharcèlement montrent que cette tranche d’âge est concernée. Les jeunes enfants sont des usagers des réseaux sociaux, le cyberharcèlement est plus important dans le primaire que dans le secondaire. Les enfants du premier degré ont moins de compétences sociales pour gérer les conflits. Lorsqu’ils sont agressés, ils agressent en retour, ce qui contribue à l’escalade des violences qui peuvent se transformer en harcèlement. Il leur manque les capacités techniques nécessaires à la gestion de l’identité virtuelle telles que savoir signaler les problèmes ou encore installer des paramètres de sécurité. Les plus grands ont plus souvent des altercations en ligne mais comme ils savent mieux les gérer, cela dégénère moins. 

Quels sont les leviers de prévention ? 

Il faut des approches interdisciplinaires et multimodales, ce n’est pas un seul facteur qui conduit un jeune à adopter des comportements harceleurs. Une prévention efficace travaille sur le développement des compétences sociales : gestion des conflits, dynamique de groupe, estime de soi mais aussi intelligence émotionnelle, notamment l’empathie. Le climat scolaire est, aussi, un levier important. Les établissements, dont le climat est basé sur la coexistence pacifique, le respect mutuel et qui offre des perspectives de développement personnel, sont des établissements où il y a le moins de violence. Les interventions doivent s’adresser à l’ensemble de la communauté scolaire dans une démarche globale avec une prise en charge individuelle pour les jeunes identifiés comme vulnérables car victimes, agresseurs ou témoins. Il faut aussi, au niveau de l’établisse ment, un discours des adultes cohérent qui ne laisse aucun doute sur leur rôle protecteur et leur capacité à venir en aide aux élèves en cas de problème. C’est essentiel pour que les élèves se sachent protégés au sein de l’école et aient suffisamment confiance pour demander de l’aide. Les actions de prévention efficaces sont celles qui impliquent toute la communauté et une participation active des élèves, et ce dès le primaire. 

Quel rôle pour les familles ?  

Les familles sont des alliés essentiels. Inclure les familles de façon active et les informer très régulièrement de toutes les actions mises en place au niveau de l’établissement permet d’obtenir leur adhésion et leur collaboration. C’est un travail d’équipe. Que leur enfant soit victime, agresseur ou encore témoin, les familles sont démunies si elles ne sont pas accompagnées par les équipes éducatives et éventuellement les partenaires de l’Éducation nationale.

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