Femmes iraniennes en lutte

Mis à jour le 24.11.22

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Itv de Dorna Javan, chercheuse iranienne en sociologie

Dorna Javan est une chercheuse iranienne en sociologie politique

FsC 486 Iran Dorna Javan

La lutte des iraniennes, un phénomène nouveau ?  

Ce qui se passe est dans la continuité des luttes menées par les femmes depuis la révolution islamique qui élimine les femmes de toute vie sociale et publique. Sous le gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad, on a assisté à l’institutionnalisation de la police des mœurs dont l’enjeu est de rappeler la dimension religieuse, politique et idéologique du hijab. Avec Raïssi, on constate un durcissement de cette pression et la montée des violences. Plusieurs vidéos sur les réseaux sociaux en ont fait état. Quelques semaines avant Masha Amini, l’histoire d’une jeune fille, qui s’était dévoilée dans un bus et qui avait été arrêtée chez elle quelques heures après, les avait enflammés. On voit que leur rôle est très important dans la démocratisation de cette lutte qui dans les années
90 était surtout le fait d’une minorité intellectuelle. 

Ce mouvement s'arrête-t-il à une lutte des femmes ?  

On ne parle pas beaucoup du rôle joué par les partis politiques kurdes qui ont, dès le début, appelé à la grève générale et à la manifestation aux côtés des femmes qui retiraient leur voile. Les autres minorités les ont très rapidement rejoints. C’est la conjonction de leurs protestations qui explique l’ampleur de cette révolte.

FsC 486  Iran   ©Mira-NAJA

« Zan, zendegi, azadi ! » ...« Femme, vie, liberté ! »

En Iran, de la capitale Téhéran à Zahedan dans le sud-est, les femmes manifestent courageusement têtes nues en scandant leur colère contre le régime islamique. Le mouvement de protestation est né le 16 septembre dernier à la suite du décès de la jeune Kurde Mahsa Amini. Accusée d’infraction pour un voile mal porté, elle est morte sous les coups de la police des mœurs. Les manifestations, initiées par les étudiantes et étudiants, se sont propagées dans tout le pays et à toute la population malgré la violence de la répression. Au 6 novembre dernier, l’ONG Iran Human Rights déplorait au moins 340 morts, dont 41 enfants. C’est en 1979, au lendemain de la révolution, que le port du voile est imposé à toutes les femmes et que leur statut les place sous la tutelle du chef de famille, mari ou père. Durant les années 90, les Iraniennes voient l’étau un peu se relâcher. Elles accèdent aux filières universitaires mais restent écartées des postes de la fonction publique et très peu présentes dans le paysage politique. Et lorsqu’elles le sont, c’est dans le camp des conservateurs, sorte de caution du patriarcat. Mais depuis 2021 et l’arrivée au pouvoir du conservateur Ebrahim Raïssi, la situation se dégrade. Soutenu par les religieux, le président de la République islamique d’Iran prône un strict respect de la loi sur le hijab. Les sanctions se multiplient pour « hijab inapproprié » jusqu’au décès de Masha Amini qui embrase le pays. « La répression des manifestations menées par les femmes iraniennes ne fait qu’alimenter la transformation de la révolte en un plus vaste mouvement politique » selon le sociologue Farhad Khorsrokhavar. Il s’agit « d’une radicalisation du mouvement des femmes, qui s’est désormais transformé en une insoumission généralisée et en des manifestations tournantes contre le régime théocratique ».

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