Evaluations standardisées
Mis à jour le 27.05.24
min de lecture
A tous les niveaux
Pisa*, Pirls**, les programmes visant à mesurer les acquis des élèves se multiplient depuis les années 2000, développant massivement des politiques d’évaluations standardisées dans les pays de l’OCDE. La France n’échappe pas à ces dispositifs qui s’imposent dans une logique de « rentabilité ».
Selon une enquête Harris interactive réalisée en 2022 par la FSU-SNUipp, seuls 4 % des PE expriment leur préférence pour des méthodes d'enseignement déterminées par des évaluations nationales. Largement disqualifiées, ces évaluations standardisées en français et en mathématiques se généraliseront dès la rentrée à tous les niveaux du CP à la Seconde. Couplées avec les évaluations des établissements, elles sont l’outil d’un pilotage qui dépossède les enseignantes et enseignants de leur pouvoir d’agir. D’après les derniers résultats publiés par la Depp*** en mars, « dans le domaine de la résolution de problèmes, les difficultés constatées en début de CP, comme en début de CE1, se confirment. Il s’agit du domaine pour lequel le niveau de maîtrise est le moins affirmé ». Cécile Allard, maîtresse de conférence en didactique des mathématiques, précise que « les connaissances didactiques se diffusent mal car apporter des réponses efficaces à des problèmes complexes requiert du temps ». Pourtant, le ministère de l’Éducation nationale se vante d’aller vite en réalisant son « choc des savoirs » sans concertation.
Culture du résultat
Présentées par le ministère comme des outils pour aider les équipes pédagogiques à répondre aux difficultés de leurs élèves, ces évaluations standardisées servent aux départements et aux académies à proposer, voire imposer des actions éducatives en fonction des résultats. Mais aucune prise en compte du contexte, ni de la dimension collective, ni du risque du bachotage des compétences évaluées. Le ministère propose des réponses individuelles stigmatisantes en dehors du temps scolaire (APC, stages de remise à niveau). La responsabilité de l’échec repose sur les PE, les familles et les élèves.
Une culture du résultat qui accentue les inégalités alors que le système éducatif français figure déjà parmi les plus inégalitaires de l’OCDE. « Les évaluations normatives entraînent des comparaisons qui dévalorisent, affirme Sébastien Goudeau, chercheur en psychologie sociale. Se percevoir comme moins intelligent génère des pensées négatives, du stress pouvant mener au décrochage. Et ce sont les filles ou les enfants des milieux populaires qui se sentent perçus comme moins intelligents ». Les comparaisons internationales invitent à d’autres choix. Jean-François Chesné, coordinateur exécutif du CNESCO, rappelle que « l’évaluation peut être la pire comme la meilleure des choses ». Mais pour qu’elle soit la meilleure, encore faut-il suivre les pistes proposées par la recherche telles que « porter attention aux situations informelles d’évaluation » ou encore « impliquer les élèves dans le processus ». L’exemple de la Finlande montre que l’évaluation fait partie intégrante du processus d’apprentissage, qu’il est possible d’évaluer sans classer et que la réussite repose aussi sur une forte professionnalité enseignante.
* Programme international pour le suivi des acquis des élèves.
** Programme international de recherche en lecture scolaire.
*** Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance.