Enfin la maternelle
Mis à jour le 23.04.23
min de lecture
Portrait d'Agnès Combes qui retrouve sens au métier en enseignant en maternelle
Agnès Combes, une Aveyronnaise aux fortes convictions pédagogiques, retrouve sens au métier en enseignant en maternelle.
« Depuis que je suis en maternelle, les apprentissages ne sont plus une course stressante », témoigne Agnès Combes, maîtresse sur l’une des classes de TPS-PS-MS-GS à Saint-Affrique (Aveyron). « Apprécier de donner le temps aux savoirs, aux partages, à construire ensemble, c’est peut-être à cause de mon côté sud ! », plaisante cette enseignante du cœur de l’Occitanie. Travaillant à l’école primaire Blanchard et Caussat, elle a profité du départ d’une collègue il y a trois ans pour basculer de l’élémentaire vers le cycle 1. « J’avais envie de sortir de « l’évaluationnite » renforcée par le livret scolaire unique, témoigne-t-elle. Ce défilé de cases avec une pression normative ignore l’enfant dans sa complexité et son environnement, je ne pouvais plus. J’avais besoin de retrouver de l’humain dans mon métier. » Un diktat de la performance résonnant particulièrement pour cette ancienne élève stigmatisée à qui on avait prédit qu’elle ne pourrait pas faire « instit » suite à un double redoublement.Pour Agnès, le carnet de suivi offre plus de liberté pédagogique mais surtout il permet de prendre en compte le rythme des acquisitions, fluctuantes, parfois ponctuelles et sur lesquelles il est logique de revenir. L’enseignante a d’ailleurs été surprise de constater combien l’erreur est très tôt intégrée comme une interdiction suite à une injonction sociale de réussite immédiate. Elle aime répéter à ces jeunes élèves : « On a tout à fait le droit de se tromper, on est là pour apprendre ensemble ! ».Agnès assume très volontiers la part d’affect davantage autorisée avec les plus petits, la place incontournable du relationnel. Ce passage à la maternelle, c’était aussi pour elle la mise en place plus régulière des activités collectives : le travail en ateliers, les manipulations, les tâtonnements sont des pratiques habituelles inhérentes à la maternelle. « J’aime aussi l’approche par le jeu », explique-t-elle. Cela apprend à la fois des règles et le plaisir de jouer ensemble tout en construisant des savoirs disciplinaires. Je ne suis pas fan des activités Montessori actuelles, c’est très individualisant, chacun à sa table. Et j’évite vraiment les fiches, je trouve que c’est un trompe-l’œil ». Avec son expérience, Agnès estime qu’elle peut résister aux pressions pour des activités de pré-CP, aux attendus trop précoces et à une compétitivité anticipée.
Que d'énergie
Évidemment, elle avoue qu’au début, cela n’a pas été simple de penser autant d’activités, sans l’appui de manuels. Alors, c’est le collectif enseignant, le partage avec les collègues de maternelle qui aide dans la conception de la classe. « Comme ça, il y a moins de formatage, s’enthousiasme-t-elle. En revanche, il faut s’adapter souvent, avec une réactivité et des sollicitudes fortes. Je rentre rincée après une journée de classe, les petits, cela demande une grande attention et tellement d’énergie ! » Elle note aussi de fait un lien avec les familles. Le contact quotidien permet les échanges directs constants et la possibilité d’une attention partagée à l’enfant. En résulte une perception accrue des inégalités sociales. « La maternelle, cela me permet de continuer à enseigner en restant fidèle à mes valeurs : penser que tous les élèves sont capables, remettre de l’égalité en aidant celles et ceux qui en ont besoin. »