Écoles-collège, collés-serrés
Mis à jour le 24.03.19
min de lecture
Création par amendement de regroupements écoles-collège, sous l'autorité du principal
La réforme par ruse : c’est par amendement que sont arrivés les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux (EPLESF) dans le projet de loi Blanquer. Un procédé pour le moins cavalier, alors que ce texte modifie profondément la structure de l’école. Il s’agit en effet de regrouper « les classes d’un collège et d’une ou plusieurs écoles situées dans le même bassin de vie » soit « en réseau en restant sur leurs sites respectifs », soit en se regroupant « au même endroit en fonction du projet ». Ces établissements seront dirigés par le principal qui chapeautera un ou plusieurs « adjoints » dont un au moins issu du primaire en charge des écoles. Sous couvert de « faciliter le parcours et le suivi individuel des élèves » de la PS à la 3e, le but est en réalité de faire des économies, de « mutualiser les moyens humains » selon les termes pudiques de la députée à l’origine de l’amendement. Ces « usines des savoirs », une quinzaine déjà prévues sur le territoire, concerneront le « très rural » ou le « très urbain », partout où les collectivités locales en décideront, après avis du Rectorat et sans consulter équipes enseignantes et familles alors qu’elles sont les plus à même de penser un projet qui réponde aux besoins. « Lorsque l’établissement regroupe 10 écoles pour un total de 40 classes, il pourra y avoir 4 adjoints », détaille la députée. Et non plus un directeur ou une directrice par école. Et les autres ? Qui va assurer le lien de proximité avec les familles et les partenaires ? Le projet est loin de répondre à l’alourdissement des tâches et aux besoins de reconnaissance des directeurs et directrices d’école. Et il va créer des inégalités sur le terrain, surtout avec les autres établissements publics, ceux d’« enseignement international » offrant un cursus d’élite aux happy few. Curieuse conception de « l’élévation du niveau général » et de « la justice sociale » proclamées par Jean-Michel Blanquer lors du vote à l’Assemblée.
Fermetures de petites écoles
Autre inquiétude : cette « mutualisation » conduisant à des fermetures de classes et d’écoles. 46,6 % des écoles primaires publiques comptent entre deux et quatre classes, la tentation sera grande de « les regrouper dans de grands établissements. Pour beaucoup de communes, ce texte va entraîner la fermeture de l’école », prévient l’universitaire Sylvie Plane qui signe une tribune dans Le Monde soutenue par de nombreuses personnalités contre « la disparition du service public de proximité de l’école ». L’association des maires ruraux de France dénonce d’ailleurs l’absence de concertation des collectivités et demande aux sénateurs d’éviter « une concentration territoriale sur un même site ». Et l’amendement arrive alors qu’une expérimentation des écoles du socle ou cités scolaires n’a été faite. Enfin l’appellation même interpelle : établissements des « savoirs fondamentaux ». Quid des autres savoirs hors « lire, écrire, compter et respecter autrui » chers au ministre ?