Des clés essentielles de compréhension
Mis à jour le 29.09.24
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Itv de Gautier Verbeke, directeur de la médiation et du développement des publics au musée du Louvre
Gautier Verbeke est directeur de la médiation et du développement des publics au musée du Louvre.
Comment la culture participe-t-elle à penser le monde et notre relation aux autres ?
C’est une question centrale. Comment participer à cette pensée du monde ? Une pensée qui évolue et dans laquelle les musées ont un rôle important à jouer, à un moment où l’on constate des cristallisations dans nos sociétés, une montée en puissance de discours très différents, avec des repères qui s’étiolent, tant au niveau de l’iconographie que des connaissances générales. Au Louvre, on peut trouver beaucoup de réponses à des questionnements contemporains à travers les œuvres, les artefacts de femmes et d’hommes qui se sont posé les mêmes questions à d’autres époques. Même si ces interrogations prenaient alors des formes différentes, la culture était déjà là pour y répondre. Aujourd’hui, nous sommes à un tournant où il faut faire preuve de modernité et réinventer les musées. Être en capacité de regarder l’histoire en face, la façon dont sont présentés les collections, leur origine, l’interrogation des visiteurs, le regard sur la place des femmes, le vivre-ensemble… Il s’agit de réinterroger les collections avec les éléments prégnants d’aujourd’hui. Les musées ont des réponses à apporter, avec une dose de nuances et de contrepoints.
“DES RÉPONSES À DES QUESTIONNEMENTS CONTEMPORAINS À TRAVERS LES ŒUVRES,
LES ARTEFACTS DE FEMMES ET D’HOMMES QUI SE SONT POSÉS LES MÊMES QUESTIONS À D’AUTRES ÉPOQUES.”
Penser l'accès universel à la culture dans le plus grand musée du monde est-il un défi ?
Le Louvre est un musée universel dans son audience puisqu’il accueille le public français mais aussi des visiteurs qui viennent du monde entier. Il faut donc accompagner cette diversité. Il est également universel par ses collections qui vont du début de l’histoire au 19e siècle, avec une nouvelle place faite au contemporain depuis la présidence de Laurence des Cars pour qui « Le Louvre est une école du regard ». Le défi est que chacun puisse contempler l’essence des collections dans un temps réduit : la durée moyenne d’une visite étant deux heures trente alors que le musée présente environ 35 000 objets. L’enjeu des équipes est de pouvoir offrir des clés de compréhension, donner des repères culturels et historiques, orienter vers des œuvres essentielles, qui ne sont pas forcément les plus célèbres, mais qui peuvent aider à comprendre ce qui est proposé et raconté. Il faut développer un maillage, un croisement des médiations, pour mettre à disposition du public des outils très immédiats dans les salles mais aussi proposer des médiations humaines pour une meilleure appropriation des collections.
Le travail avec les écoles est-il important pour le Louvre ?
L’enjeu d’éducation est majeur car le Louvre construit son public de demain. Le sur-tourisme a entraîné une désaffection du public français qu’il faut faire revenir pour renouer avec cette grande histoire du Louvre. Le Louvre incarne l’histoire de France, c’est le manuel le plus complet pour aborder tous les domaines. Placer l’éducation au centre, c’est recevoir davantage les scolaires, développer des projets avec les académies franciliennes et proposer des avantages utiles aux enseignants avec une carte de fidélité dédiée, la carte Clef. Depuis l’an dernier, nous ouvrons le Louvre aux scolaires le mardi, jour de fermeture au public : cela permet des moments exceptionnels avec un rapport très privilégié aux œuvres. Imaginez le tête à tête avec la Victoire de Samothrace ou La Joconde ! De plus, c’est l’occasion de découvrir la vie d’un musée : entretien, conservation, accrochage des œuvres... Le bilan est très positif et nous allons renforcer cet accueil.
La médiation peut-elle être pensée "à distance" pour les publics éloignés ?
Il y a déjà des pages dédiées sur le site du Louvre pour le public de l’Éducation nationale avec des références pédagogiques, des pistes de travail élaborées avec des enseignants spécialement missionnés par les académies de proximité et des formations pensées pour les professeurs. Le Louvre ambitionne de renouer avec l’ensemble du territoire, de développer une hybridation des ressources numériques et des médiations humaines qui s’enrichissent mutuellement. De grands projets pour les mois qui viennent !