Un rapport qui stigmatise l’école publique
Mis à jour le 23.05.25
min de lecture
« Un système éducatif en situation d’échec, des inégalités qui s’aggravent » et une « organisation en décalage avec les besoins de l’enfant » : le rapport publié par la Cour des comptes le mardi 20 mai dresse un bilan alarmant du système scolaire français. Si la FSU-SNUipp ne peut que constater que l’école est actuellement en crise, le rapport de la cour ne dresse qu’un constat comptable dans un rapport fourre-tout. Et ne propose aucune piste susceptible d'améliorer son état, à l'heure où un choc des moyens est indispensable.
Un rapport très sévère
« En dépit des efforts consentis ces dernières années, notamment à travers le dédoublement des classes pour certains publics dits prioritaires, la France dépense moins que les autres pays dans l’enseignement élémentaire». Le rapport pointe un budget qui ne cesserait de croître alors qu’une étude approfondie des différentes données montre bien que si l’on analyse les « efforts consentis » en euros constants, ils sont inexistants. Mais surtout, les dépenses intérieures d’éducation qui représentaient 6,7% du PIB en 2023 représentaient 7,8% en 1995 : un sous-investissement bien plus profond et beaucoup plus durable que ce que le rapport laisse à penser. (Source Insee)
Pour la FSU-SNUipp, l’école n’est pas un coût mais un investissement. D’ailleurs, l’OCDE démontre que les pays européens qui réussissent le mieux en termes de résultats scolaires sont ceux qui investissent le plus dans les premiers âges de la scolarisation. Ce qui n’est pas le cas de la France qui investit plus au secondaire qu’au primaire.
Les magistrats pointent également « Le déclin des performances scolaires des élèves, notamment vis-à-vis de nos voisins européens, s’accompagne d’une incapacité de la politique éducative à résorber les fortes disparités de niveau, en particulier la proportion d’élèves qui sont en difficultés majeures ». Ces mauvais résultats sont confirmés par différentes enquêtes internationales comme l’enquête TIMMS sur les mathématiques classe par exemple la France en bas du tableau. La Cour des comptes note des résultats «alarmants» alors que « le nombre d’heures passées à enseigner les mathématiques en France est bien plus élevé que la moyenne européenne ». Elle relève en outre un écart de réussite entre filles et garçons qui s’est « significativement creusé entre 2015 et 2022 ». Un constat qui fait écho au plan «filles maths» présenté la semaine passée par la Ministre.
Ce constat, la FSU-SNUipp le fait depuis plusieurs années et dénonce cette priorité aux fondamentaux mise en place depuis 2017. La série d’injonctions faites en Français et mathématiques ont éloigné les enseignant·es d’un enseignement basé sur des compétences de haut niveau. Les nouveaux programmes ne risquent d’ailleurs pas d’améliorer les choses tant ils sont axés sur des compétences très “mécanistes”.
De mauvaises réponses à un état des lieux dégradés
Pour répondre à ces difficultés structurelles, la Cour des comptes propose plusieurs pistes.
Elle souhaite « créer un statut de directeur » pour « lui donner les leviers nécessaires pour piloter le projet pédagogique ou encore renforcer son rôle auprès des partenaires extérieurs ».
Si le constat d’une direction en souffrance dans toutes ses missions est évidemment partagé et dénoncé par la FSU-SNUipp depuis des années, la préconisation des rapporteurs va à l’opposé du besoin des écoles et des directeurs et directrices. La mise en place d’un échelon hiérarchique ne répond pas à la surcharge de travail ni à la demande de la profession enseignante qui souhaite que le directeur ou la directrice d’école reste un pair parmi les pairs. La Cour des comptes évoque d’ailleurs l’idée de « généraliser une décharge totale » preuve que d’autres réponses sont possibles. La FSU-SNUipp demande depuis plusieurs années à revoir la question des décharges de direction mais également la question de l’aide administrative.
Au moment même où le président annonce lancer une consultation citoyenne sur les temps de l'enfant, le rapport met aussi sur le devant de la scène la question des rythmes scolaires. Se basant sur un rapport de 2010 de l’Académie des sciences, il prône un retour aux 4,5 jours de classe pour « répondre aux besoins de l’enfant » alors qu’à ce jour aucun bilan n’a été tiré des différentes réformes des rythmes scolaires mises en place.
La Cour des comptes fait l’impasse sur l’ensemble des temps de l’enfant. Le temps scolaire est une question complexe qui ne peut se réfléchir sans prendre en compte l’organisation de la société toute entière (horaire de travail des familles, situation du périscolaire, manque d’investissement de l’Etat pour l’éducation populaire…). La seule entrée chronobiologique est insuffisante. Les pratiques enseignantes, les conditions matérielles d’apprentissage, les inégalités territoriales et l’ensemble des déterminismes sociaux constituent des éléments qui pèsent aussi sur les apprentissages. Des pistes qui sont de fait absentes des réflexions des magistrat·es. Certains enjeux actuels de l’école telle que l’inclusion ne sont pas traités dans ce rapport, ce qui pose réellement question.
Par ailleurs, les différentes alternances politiques de ces dernières années ont produit sur l’école des effets dévastateurs avec un empilement de réformes (changement de programmes) et de nouveaux dispositifs qui empêchent une stabilité dans les pratiques et le travail enseignant.
Ce rapport au vitriol de la Cour des comptes confirme que l’école est en crise et que les politiques des dernières années ont mis à mal l’école. L’école ne doit pas être un coût mais un investissement. La FSU-SNUipp se mobilisera pour obtenir un budget ambitieux pour un service public d’éducation de qualité.