Loi Blanquer au Sénat : dernier round ?

Mis à jour le 10.05.19

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Mardi 14 mai débute l’examen du projet de loi « école de la confiance » par le Sénat. Sous la pression des mobilisations enseignantes, des parents, des élus… les EPLESF seraient revus mais la mise de l’école primaire sous la coupe du collège et la concentration du réseau scolaire persistent. Par ailleurs de nombreux amendements sénatoriaux portent une vision inquiétante de l’école et peu en prise avec sa réalité. Cette semaine sera donc cruciale pour la communauté éducative qui exige l'abandon de ce texte et un autre projet pour l'école. Actions dans les départements toute la semaine et manifestation nationale parisienne samedi 18 mai : toutes et tous #AParisLe18.

Les fortes mobilisations de la communauté éducative depuis le mois de mars ont fait vaciller le ministre qui croyait pouvoir avancer seul. Les acteurs et actrices du terrain l'ont ramené à la réalité, alertant sur son projet de loi et ce qu'il dessine pour l'école : une menace sur la spécificité de l’école primaire et son organisation territoriale, une volonté de restreindre la liberté d'expression enseignante, davantage d'argent versé à l'enseignement privé, une réforme de la formation initiale développant la contractualisation d’étudiantes et étudiants... Si l'Assemblée nationale a voté en première lecture le texte, le Sénat va l'examiner à partir de demain, mardi 14 mai, avant son adoption éventuelle par une commission mixte paritaire rassemblant des parlementaires des deux chambres.

Des établissements publics des savoirs fondamentaux amendés

EPSF supprimés, c’est ce que la commission culture et éducation du Sénat a décidé à l’unanimité mais les « établissements publics des savoirs fondamentaux », déjà arrivés dans la loi Blanquer par la petite porte (amendement d’une députée), devraient revenir par la fenêtre… Une nouvelle rédaction est prévue par le groupe LREM qui prend en compte ce qui a été martelé dans les cortèges. Mais partiellement. Ainsi, l’accord de la communauté éducative serait enfin demandé, ce qui n'était pas le cas dans le texte voté à l'Assemblée : « L'accord du conseil d’administration et des conseils des écoles impliquées sont nécessaires ». Cependant, l'autorité hiérarchique resterait celle du collège, « avec un ou plusieurs chefs d’établissement adjoints dont un au moins est chargé des classes du premier degré, exercent aux côtés du chef d’établissement. Ce chef d’établissement adjoint, chargé du premier degré, est issu du premier degré ». Les écoles regroupées à un collège dans ces structures perdent donc toujours leur direction.

Ce retour de l’article 6 quater a pris en compte les critiques mais, pour le SNUipp-FSU, la continuité des apprentissages du primaire au secondaire doit être pédagogique et non administrative. Les écoles ne doivent pas être noyées dans de méga-structures, sous la coupe du collège, centrées sur les fondamentaux et ne répondant aucunement aux besoins de baisse des effectifs, d’aide à la difficulté scolaire et de lutte contre les inégalités. De plus, pourquoi faire cohabiter plusieurs types d’établissements, écoles, établissements publics ? Car ceux réservés à un enseignement international, EPLEI, demeureraient. Il serait juste proposé, pour « plus de mixité sociale » de les ouvrir à des élèves ne préparant pas cette option pour « happy few ». 

Autres concessions

De même, la nouvelle réécriture sénatoriale confirme la dérogation de deux à trois ans aux jardins d'enfants qui accueillent des 3-6 ans et non leur pérennisation. Ils auront ce délai pour se transformer mais l'objectif à terme est que l'instruction obligatoire dès 3 ans se fasse à l'école.
Enfin, la composition du nouveau Conseil d’évaluation de l’école, remplaçant le Cnesco, pourrait être modifiée avec des personnalités proposées par l’Assemblée nationale, le Sénat et l’Institut national de France, mais le ministère garderait néanmoins la main et supprimerait le CNESCO qui a fait ses preuves.

Article 1 maintenu

En revanche, l'article 1 si décrié est maintenu. Il devait être réécrit, pour « lever les ambiguïtés  » mais la volonté de sanctionner les enseignantes et enseignants critiques envers l'institution reste bien là. Ces derniers temps, les courriers reçus, les convocations pour rappel à l'ordre de personnels qui s’étaient exprimés publiquement montrent qu'il ne s'agit en rien d'un « bobard ». Cet article n'apporte rien juridiquement mais envoie un signal très négatif à la profession. Le ministre avait promis une évolution. La réécriture entérine l’autoritarisme ministériel. Cet article doit être supprimé d’urgence.

à surveiller

Les amendements sénatoriaux viennent de différents groupes politiques et certains inquiètent comme la « retenue sur les allocations familiales versées aux parents d’élèves de moins de 16 ans » après quatre demi-journées d’absences non-justifiées, le statut hiérarchique des directeurs et directrices d'école sur leurs équipes ou encore la formation continue obligatoirement placées sur les temps de congés.

Mobilisations toute la semaine

C'est pourquoi cette semaine d'examen au Sénat se fait sous le regard de toute la communauté éducative qui reste très mobilisée. Car c'est bien d'un autre projet dont l'école a besoin pour s’attaquer aux inégalités scolaires et démocratiser ainsi la réussite de tous les élèves.
Les Nuits des écoles et autres actions rassemblant parents et monde enseignant se poursuivent, la journée du 14 mai est marquée par des grèves et des rassemblements, dont un devant le Sénat à 18 h.
Samedi, #àParisLe18 : une grande manifestation nationale part de Montparnasse à 13 h 30.
L'exigence est l'abandon de ce projet de loi et la construction d'un vrai projet d’avenir pour l’école.