22 mars : les raisons de la colère

Mis à jour le 26.03.18

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Le 22 mars, les salariés de la Fonction publique, rejoints par les cheminots, étaient dans la rue pour défendre leurs conditions d’emploi et leur pouvoir d’achat mais aussi pour promouvoir des services publics de qualité et s’opposer à la remise en cause du modèle social par le gouvernement.

Une "nouvelle gouvernance" de la Fonction publique ?

Le discours est récurrent. Trop de fonctionnaires, des services publics peu efficaces qui coûtent trop cher, pas assez de flexibilité...Une campagne de dénigrement orchestrée par le gouvernement pour justifier les mesures qui menacent directement le statut de la Fonction publique, le périmètre de ses missions et met à mal l’attachement aux services publics. C’est pour s’opposer à cette dégradation que les salariés de la Fonction publique ont défilé le 22 mars, rejoints par les cheminots, première cible du gouvernement dans son entreprise de démantèlement des services . Le 1er février, Édouard Philippe annonce clairement sa vision libérale avec un "big bang " de la Fonction publique. L’assouplissement du statut des agents publics, à travers la rémunération au mérite au lieu du dégel du point d’indice et le recours à des contractuels plutôt qu’à des emplois stables. Mais aussi un plan de départs volontaires parallèlement à la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires. Pour finir, il remet en cause les instances de concertation, lieux indispensables pour défendre les droits des agents, ou leurs conditions de travail comme en CHSCT. A travers ses déclarations, l’objectif du gouvernement est clair : installer une nouvelle gouvernance et réaliser de nouvelles économies budgétaires qui s’ajoutent au contentieux généré par le gel du point  d’indice, le retour du jour de carence ou le report d’un an de PPCR.

Le service public : pas un coût mais un investissement

Mais la Fonction publique est garante de l’intérêt général, au service de la cohésion sociale, et des moyens existent pour pérenniser des services publics qui permettent de corriger les inégalités sociales et répondre aux besoins de toutes et tous sur l’ensemble du territoire. Oui, un service public de qualité a un coût mais différentes études démontrent que les dépenses de fonctionnement de l’État en France ne sont pas plus importantes que dans les autres pays européens. Les choix opérés par le gouvernement favorisent toujours les plus riches. Près de 3 milliards de ristourne par an pour les 340 000 assujettis à l’impôt sur la fortune par l’exclusion de l’assiette de l’impôt sur le capital financier. Les 11 milliards sur 5 ans que coûte la baisse programmée de l’impôt sur les sociétés ont très peu d’impact sur l’emploi. A rapprocher des 6 milliards d’euros nécessaires pour atteindre la dépense moyenne des 11 pays européens comparables à la France, décidément « La priorité au primaire » n’est pas au rendez-vous des choix budgétaires du gouvernement. Les effectifs restent pléthoriques, les conditions de travail des enseignants se dégradent, le recrutement de contractuels s’installe dans les écoles, le reconnaissance n’est pas au rendez-vous... autant de bonnes raisons qui ont également mobilisé les enseignants le 22 mars.

Une journée réussie 

Avec près de 400 000 fonctionnaires dans les rues, on a retrouvé des manifestations spectaculaires inédites depuis quelques années.  50 000 personnes ont défilé à Paris et les cortèges étaient impressionnants dans de nombreuses villes de France :  plus de 10.000 personnes à Marseille, Nantes, ou Lyon, 11.000 à Toulouse mais également 3.800 au Mans, 2.200 à Amiens, 4.000 à Clermont-Ferrand ou 4.500 à Perpignan. Avec un quart des personnels en grève dans le premier degré, les enseignants ont largement répondu à l'appel du SNUipp-FSU. Une réussite selon Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, pour qui " Il y a dans la fonction publique une mobilisation importante qui s'est exprimée aujourd'hui qui montre que les fonctionnaires ne sont pas prêts à lâcher une certaine idée de la fonction publique et à renoncer à porter des exigences tout à fait logiques. Il y a un désaccord massif qui s'est exprimé. Que le gouvernement revienne en disant, on remet tout cela sur la table et on fait un vrai dialogue social où on entend aussi les propositions que portent les organisations syndicales pour travailler à un autre avenir de la fonction publique."

La  balle est donc désormais dans le camp du gouvernement qui doit préparer les discussions qui vont s'ouvrir sur des bases nouvelles, faute de quoi la colère risque encore de gonfler chez les fonctionnaires et leurs organisations syndicales.